Canular n°18 - 2 - Pièces de Charles-Simon Favart

Niveau moyen

Retrouvez les véritables titres des pièces de Favart. Attention aux pièges tendus par notre farceur de service !

Les Deux Tunnels
La Poire de Bezons
Le Cale-bourgeois
La Chercheuse de cris
La Fête des Saints Clous
Le Prix de sa terre
L'Hippo. est par ici
Le Toc de village
Noix de cajou
Les Mamours à la noix
Cimetière assiégé
Menhir et Beurette
Les Dindes dansantes
Crouton et Rosette
Les Amours de Baston et Bas-se-tiennent
La Serre vante mes tresses
Minette à la tour
Les Trois Soutanes ou Soliman fécond
Aneth et Lupin
L'Onglet à bords doux
La Fée Prunelle ou Ce qui plaît aux cames
La Rombière de Salency
Le Bel Larsen


Réponses ci-dessous. Answers below.

1734 : Les Deux Jumelles
1735 : La Foire de Bezons
1738 : Le Bal bourgeois
1741 : La Chercheuse d'esprit
1741 : La Fête de Saint-Cloud
1742 : Le Prix de Cythère
1742 : Hippolyte et Aricie
1743 : Le Coq de village
1744 : Acajou
1747 : Les Amours grivois
1748 : Cythère assiégée
1750 : Zéphire et Fleurette
1751 : Les Indes dansantes
1753 : Raton et Rosette
1753 : Les Amours de Bastien et Bastienne
1755 : La Servante maîtresse
1755 : Ninette à la cour
1761 : Les Trois Sultanes ou Soliman Second
1762 : Annette et Lubin
1763 : L'Anglais à Bordeaux
1765 : La Fée Urgèle ou Ce qui plaît aux dames
1769 : La Rosière de Salency
1773 : La Belle Arsène

Sabine Chaouche
03/31/2017

Publication: "Creation and Economy of Stage Costumes. 16th-19th century" ed by Sabine Chaouche

Publication type: Journal
Editor: Chaouche (Sabine)
Abstract: European Drama and Performance Studies is a journal devoted to the history of performing arts. Thematic issues are published in French and/or English.
Number of pages: 375
Parution: 07-05-2023
Journal: European Drama and Performance Studies, n° 20

Ce volume fait découvrir au lecteur un atelier souvent méconnu : celui des costumes de théâtre sous l’Ancien Régime. Il met en lumière les différents métiers relatifs à la fabrication des tenues des acteurs, l’univers des marchands ainsi que les coûts liés aux commandes de textiles ou de vêtements. Cet ouvrage redonne une place centrale à l’archive, et plus particulièrement aux sources méconnues que sont les factures des tailleurs, des perruquiers ou d’autres fournisseurs tels que les drapiers, les merciers, les plumassiers, les bonnetiers etc. Il met en lumière à travers les huit articles et annexes qui le composent, un pan de l’histoire du costume de scène longtemps délaissé.


classiques-garnier.com/european-drama-and-performance-studies-2023-1-n-20-creation-and-economy-of-stage-costumes-16th19th-century-en.html

Sabine Chaouche
10/14/2023

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Tuesday, September 6th 2016
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"Le Suicide à la scène": "Crébillon versus Voltaire : quelle dramaturgie du suicide ?" par Marek OCENAS




Noémie Courtès (dir.)



La représentation de la mort sur la scène tragique de la seconde moitié du XVIIe et tout au long du XVIIIe siècle relève des contraintes dramatiques et esthétiques. Si elle trouve progressivement sa place dans le récit, c’est parce que les théoriciens du théâtre classique sont persuadés que la mort ne pourrait pas être représentée d’une manière vraisemblable et que par-là le plaisir du spectateur serait empêché. La représentation théâtrale doit en effet susciter chez ce dernier l’illusion de la vérité de telle sorte que l’action se déroulant sur scène, les personnages, le temps et le lieu le transposent véritablement dans l’univers de la pièce (1). C’est pourquoi les combats, les duels et les meurtres disparaissent peu à peu de l’action proprement dite pour se retrouver dans les récits. La seule exception à cet égard représente le suicide : « Ceux qui prétendent qu’il ne faut jamais ensanglanter le théâtre ignorent ce que c’est que de l’ensanglanter ; il ne faut jamais y répandre le sang de personne, mais on peut y verser le sien, quand on y est porté par un beau désespoir ; c’est une action consacrée chez les Romains (2) ». De nombreuses tragédies de Corneille et de Racine seront à cet égard prises pour modèles. Or la question du suicide n’est pas pour autant résolue et soulève un problème moral compte tenu de l’interdit de l’Église qui frappe « l’homicide de soi-même ». Car c’est tout d’abord un acte « contre la nature » puisque l’homme n’est pas auteur de sa vie, la tenant de Dieu, et qu’il ne peut donc pas en disposer librement, peut-on lire dans l’article « Suicide » de l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert (3).

Dans l’imaginaire occidental, le suicide relève d’un acte volontaire résultant essentiellement d’un désespoir insurmontable : s’ôte la vie celui qui ne sait pas faire face à la situation qui le trouble. C’est, selon Starobinski, de deux manières : « d’un côté, le suicide accompli en pleine connaissance, au terme d’une réflexion où la nécessité de mourir, exactement évaluée, l’emporte sur les raisons de vivre ; à l’opposé, l’égarement démentiel qui se livre à la mort sans penser la mort ». Si « les images du suicide […] oscillent entre [ces] deux types extrêmes (4) », leur exploitation dramatique connaît une fortune remarquable sur la scène tragique classique. Dans ses Réflexions sur la Poétique, Fontenelle va jusqu’à déclarer qu’« une mort volontaire que choisirait le Héros, pour éviter un plus grand malheur, une mort telle que celle de Caton, de Sophonisbe, ou de Camma ne doit pas être comptée parmi ces dénouements malheureux qui renvoient le spectateur mécontent (5) ». C’est qu’il est, pour le héros, plus noble de mourir admirablement que « dans l’oppression » quitte à donner « un exemple très mauvais parmi nous (6) ». Comme le déclare l’abbé Desfontaines, Fontenelle « ne dit rien ici que de conforme à la pratique du théâtre, et au préjugé établi » ; « ce qui hors du théâtre ferait horreur (7) », ajoute-t-il en indiquant la contradiction écartée par Bertrand de Morvan. Le suicide reste pourtant toléré sur la scène tragique : Desfontaines l’explique par le fait qu’il « ne passait point pour un crime horrible chez les premiers inventeurs de la tragédie » et que celle-ci « a conservé ce vice dérivé de la morale corrompue des païens (8) ». Autrement dit, accepter le suicide sur scène, c’est une question d’accoutumance aux valeurs « héroïques » qu’il véhicule dans l’imaginaire littéraire. Si bien que l’homicide de soi-même a pu devenir une pratique courante pour achever l’action tragique compte tenu des modèles (aussi bien anciens que modernes) et de la fortune scénique que le suicide offre aux dramaturges à la recherche d’un plus grand effet. Crébillon ne fait pas exception à cet égard, loin de là, alors que sa dramaturgie largement fondée sur la présence d’un suicide placé au dénouement se voit contestée par son adversaire le plus aguerri, Voltaire.

Pour peu que les « règles » de la tragédie classique autorisent les personnages à se donner la mort sur scène, il ne s’agit pas d’un procédé dramatique qui assure à la pièce un dénouement platement malheureux : la résolution par le suicide tient à un choix délibéré du dramaturge, parce qu’elle structure l’action qui doit arriver à son point d’aboutissement d’une manière parfaitement vraisemblable, et puisqu’elle ne manque pas non plus d’assigner au sujet traité une signification nouvelle. Si, curieusement, Voltaire réécrit toutes les tragédies de Crébillon qui s’achèvent par un suicide (Atrée et Thyeste, 1707, Sémiramis, 1716, Catilina, 1748, Le Triumvirat, ou la Mort de Cicéron, 1754) ou un suicide/ homicide inconscient (Électre, 1709), il a recours, Les Pélopides (1771) mis à part, à un tout autre dénouement dans les siennes : le matricide dans Sémiramis (1748) et Oreste (1750), ou un dénouement sans mort dans Rome sauvée, ou Catilina (1752) et Octave et le Jeune Pompée, ou le Triumvirat (1764). On est ainsi fondé à s’interroger sur la manière dont le suicide, procédé efficace pour produire une dramaturgie de l’effet, ressortit en même temps à des choix esthétiques et des enjeux philosophiques dessinant nolens volens deux univers tragiques radicalement opposés.


Deux dramaturgies opposées

Le choix du suicide dans le dénouement semble l’un des enjeux essentiels de la rivalité entre Crébillon et Voltaire d’autant plus que le dénouement engage considérablement la signification de l’action mise en œuvre par un dramaturge. C’est évident compte tenu de la grande souplesse du dispositif dramaturgique classique malgré la rigidité des règles qui font croire le contraire. Le dramaturge n’est pas en effet censé mettre en scène l’histoire telle qu’il la trouve dans les sources, généralement l’histoire et la mythologie antiques. Aristote même insiste sur la différence entre l’historien et le poète, déclarant que ce dernier a pour devoir de re-créer la réalité telle qu’elle devrait être (9). Si bien que le dramaturge se trouve parfaitement libre de réaménager les données de l’histoire ou de la mythologie afin de proposer une action et des caractères améliorés. Les circonstances y prêtent d’autant plus facilement que les nombreuses sources peuvent être contradictoires, comme le montre le cas de Sémiramis mais aussi d’autres pièces. Voltaire, en reprenant Crébillon, veut d’abord montrer qu’il sait mieux faire que son rival dont il conteste la dramaturgie.

Dans leurs Sémiramis, Crébillon et Voltaire s’opposent d’emblée par leur dénouement : le premier soigne le coup mortel que l’héroïne se donne brusquement et contre toute attente en prononçant les derniers vers de la pièce ; le second charge du coup meurtrier Ninias, fils de Sémiramis. Cette divergence s’explique par l’attitude qu’adopte la reine dans chacune des deux pièces. Alors que la Sémiramis de Crébillon se suicide furieuse de se voir humiliée d’apparaître comme une mère incestueuse, celle de Voltaire entre dans une toute autre logique passionnelle : se repentant de ses fautes passées, elle considère sa mort comme la juste punition divine. Les deux dénouements sont possibles, attestés par les sources antiques, et conduisent de toute façon à la même résolution du conflit tragique conformément à l’histoire : la mort de Sémiramis et l’accession de Ninias au trône (10). Le suicide ou le matricide involontaire semblent dans ces conditions une simple modalité qui assure l’anéantissement du personnage perturbateur de l’ordre.

C’est également le cas pour ce qui est de l’élimination de Clytemnestre dans les Électre, trop délicate parce qu’un matricide assumé, tel qu’issu notamment de l’Électre de Sophocle (11), heurterait les sensibilités des spectateurs contemporains. La mort de Clytemnestre dans les tragédies de Crébillon et Voltaire peut ainsi être à juste titre considérée comme le fruit d’un combat meurtrier survenu contre la volonté d’Oreste, lorsque la veuve d’Agamemnon en proie à son trouble s’impose entre son fils et son époux qu’elle cherche à protéger. Le coup mortel que porte Oreste à sa mère semble plus ambigu dans la pièce de Voltaire : Électre qui voit et raconte ce qui se passe « derrière la scène » encourage son frère à frapper Égisthe, lorsque soudain Clytemnestre s’écrie « Mon fils… j’expire de ta main (12) » sans plus de détail. Si l’on en croit le récit de son gouverneur Palamède, l’Oreste de Crébillon tue sa mère sans avoir conscience de son acte :

J’ai vu, Seigneur, j’ai vu : ce n’est pas l’imposture
Qui vous charge d’un coup dont frémit la nature.
De vos soins généreux plus irritée encor,
Clytemnestre a trompé le fidèle Anténor ;
Et remplissant ces lieux et de cris et de larmes,
S’est jetée à travers le péril et les armes,
Au moment qu’à vos pieds son parricide époux
Était prêt d’éprouver un trop juste courroux.
Votre main redoutable allait trancher sa vie :
Dans ce fatal instant la reine l’a saisie.
Vous, sans considérer qui pouvait retenir
Une main que les dieux armaient pour le punir,
Vous avez d’un seul coup qu’ils conduisaient peut-être,
Fait couler tout le sang dont ils vous firent naître.
(13)

Oreste ne porterait donc pas la responsabilité du meurtre : c’est le hasard ou les dieux qui l’auraient forcé à punir les coupables, mais c’est surtout Clytemnestre qui, venue empêcher son fils de tuer Égisthe, s’expose elle-même à son coup. Ainsi l’oracle est rempli, Clytemnestre mourant de la main d’Oreste.

Dans les tragédies romaines sur le sujet de Catilina, le clivage entre le suicide et son refus par Voltaire a le même statut comme dans les pièces mythologiques. Alors que le personnage perturbateur se suicide chez Crébillon, il survit chez Voltaire, même si cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y aurait pas de morts ou de suicides. Dans Catilina de Crébillon, le traître s’impose comme « héros » ou meneur de jeu, car c’est en fonction de ses manigances que l’action avance pour s’achever sur son suicide spectaculaire, alors que ses complices sont conduits au supplice. Une fois Catilina vaincu, la mort représente pour lui la seule issue possible pour éviter une nouvelle humiliation de la part de Cicéron qu’il ne parvient pas à écarter. Son suicide est toutefois prémédité, et ne se voit différé que lors des délibérations ultimes avec Tullie, son amante et fille de son ennemi juré :

Un malheureux vient d’être vaincu,
Honteux de vivre encore, ou d’avoir tant vécu.
Dieux, qui m’abandonnez à mon sort déplorable,
Ramenez-moi du moins l’ennemi qui m’accable !
En vain pour le chercher j’échappe à mille bras,
Le lâche à ma fureur ne s’exposera pas,
Tandis qu’au désespoir mon cœur est tout en proie,
Mes cruels ennemis se livrent à la joie !
Ce fer que je gardais pour leur percer le flanc,
Ne sera plus souillé que de mon propre sang
(14).

Cette longue délibération a ainsi pour but de justifier la décision prise par Catilina en toute conscience. Dans la Rome sauvée de Voltaire, le traître bouleverse l’ordre public mais n’est pas le personnage principal. C’est Cicéron qui, selon les paroles du dramaturge, devient le héros de la pièce : en plus d’une nouvelle tragédie « sans déclaration d’amour », il déclare avoir eu « surtout pour objet de faire connaître Cicéron aux jeunes personnes qui fréquentent les spectacles » (15). Si bien que le traître se voit écarté de l’action dès la fin du quatrième acte, après avoir été obligé de se découvrir grâce à l’intervention d’Aurélie, son amante, dont il a tué le père pour servir sa cause. C’est le suicide de celle-ci qui fait éclater sa rage et le pousse à se découvrir. Le suicide d’Aurélie représente ainsi un coup de théâtre à la faveur duquel la trahison de Catilina peut enfin être déjouée.

Les tragédies romaines sur le triumvirat présentent des sujets différents : Crébillon met en scène la mort de Cicéron, tandis que Voltaire cherche son inspiration dans le Cinna de Corneille en visant, pour le dénouement de son Triumvirat, la clémence d’Auguste, Cicéron étant dans sa tragédie déjà mort. Cette mort dans celle de Crébillon est le fruit d’un jeu de pouvoir entre Octave et le parti républicain représenté par l’orateur. Le récit de son meurtre fait entendre qu’il a été éliminé par manque de protection d’Octave, refusé par sa fille. C’est son père que celle-ci vient réclamer à la fin du cinquième acte, prête à échanger sa vie contre le consentement d’épouser le futur empereur et à renoncer à Sextus Pompée dont elle est amoureuse, lorsqu’elle découvre soudain sa tête cachée sous un voile. Cette découverte la conduit, sans hésiter, à se percer le sein, décevant une nouvelle fois les vœux d’Octave.

Le suicide joue différentes fonctions dans l’économie de l’action. Il sert surtout à résoudre le conflit tragique, permettant l’instauration d’un nouvel ordre après une (longue) période de troubles généralement entraînés par l’usurpation du pouvoir. Son poids sur l’action s’explique dans ces conditions par sa place stratégique au dénouement où le personnage perturbateur se voit écarté ou, en l’occurrence, éliminé. Mais, comme dans la Rome sauvée de Voltaire, le suicide peut également représenter une péripétie contribuant à amener la catastrophe. Or sa place clé dans la disposition de l’intrigue n’est pas sans incidence sur la dimension esthétique de la pièce : elle est même essentielle dans la production des émotions tragiques et par-là du plaisir postulé du spectateur.


Le suicide sur la scène : un choix esthétique

Le choix du suicide relève du projet esthétique puisque sa mise en scène est pensée en fonction de la recherche d’un effet. Dans la tragédie classique, selon les vœux d’Aristote repris par les théoriciens du XVIIe siècle, l’action doit amener la crainte et la pitié, ou leurs avatars la terreur et la compassion, conformément au principe de la vraisemblance dont découlent, en plus des règles des trois unités, également les bienséances. Ainsi, il n’est pas possible de représenter sur la scène les meurtres : ceux-ci ne pourraient pas l’être non seulement d’une manière vraisemblable mais ils risqueraient aussi de susciter l’horreur. Le suicide fait à cet égard la seule exception honorable, et peut représenter une heureuse variante puisque certains meurtres seraient insupportables à la sensibilité des spectateurs, même mis en récit, notamment dans le cas des parricides et matricides.

Dans les Sémiramis, le suicide ou le matricide involontaire ne produit pas le même effet, le choix du dénouement étant le moyen de mettre en valeur l’une des deux émotions tragiques. Alors que Crébillon parie sur la terreur, Voltaire opte pour la pitié. En effet, Crébillon se dispense d’introduire le matricide en plus de la passion incestueuse qu’éprouve Sémiramis, probablement pour prévenir l’horreur qu’aurait suscitée une telle configuration de l’intrigue. Il y supplée néanmoins, dès la révélation de l’inceste, au milieu du quatrième acte, par la fureur, la rancune vengeresse et les imprécations de l’héroïne lancées contre son fils. C’est à ce moment que celle-ci se suicide malgré les pardons et les vœux pathétiques de ses « ennemis », sa mort désespérée suscitant la terreur amenée par la violence verbale et couronnée par le coup d’épée meurtrier. Voltaire, en revanche, conserve aussi bien l’inceste que le matricide, mais avec une portée plus émouvante : sa Sémiramis apparaît en effet repentante tout au long de l’action et son fils à l’écoute de ses remords la tue en se méprenant sur sa cible lorsque, dans l’obscurité du tombeau de Ninus, il croit éliminer Assur. Puisqu’elle pardonne à son fils troublé par l’acte homicide, la tension menant vers la terreur retombe au profit d’un dénouement pathétique qui se solde par les pardons et la réconciliation.

Les deux Électre, à supposer que Clytemnestre contribue elle-même à sa mort, reprennent la même répartition des émotions tragiques. La Clytemnestre de Crébillon, en découvrant l’identité de son meurtrier, se laisse gagner par la fureur et déploie contre son fils une hostilité extrême qui se traduit par des imprécations haineuses. L’effet de terreur que produit une telle attitude se voit prolongé par la « folie » d’Oreste qui tente de se suicider, se mêlant à la pitié que suscite son trouble dans la mesure où il ne parvient pas à s’assumer matricide. Que les propos de Clytemnestre soient censés faire frémir, c’est ce que fait croire Voltaire dans la note ajoutée à la fin de sa tragédie : « Cette action théâtrale a fait beaucoup d’effet à Versailles, parce que la scène, quoique trop étroite, était libre, et que le fonds plus rapproché, laissait entendre Clytemnestre avec plus de terreur, et rendait sa mort plus présente » (16). Or Clytemnestre de Voltaire ne prononce qu’un vers incomplet, reconnaissant aussitôt le meurtrier en son fils, si bien que l’effet final repose essentiellement sur le trouble d’Oreste. Mais cet effet n’est pas le même que chez Crébillon puisque Clytemnestre connaissait l’identité d’Oreste et s’est mise à le défendre devant Égisthe. Le dénouement est donc malgré tout plus pathétique dans la mesure où le fils et la mère ressentaient de l’affection l’un pour l’autre et où le coup meurtrier est accidentel de la part de celui qui le donne.

Crébillon exploite le suicide de la même façon dans ses tragédies romaines : quelle que soit la manière dont il l’amène, il cherche à produire une plus grande terreur. Dans Catilina, la scène de délibération qui précède le coup d’épée meurtrier permet au dramaturge de laisser surgir la haine du traître contre ses ennemis, et de lui faire braver le destin et les dieux qui lui sont défavorables :

Ô ! de mon désespoir, vil et faible instrument,
Tu me restes donc seul dans ce fatal moment ?
Mes généreux amis sont morts pour ma défense
Et pour comble d’horreurs, je mourrai sans vengeance.
Dieux cruels, inventez quelque supplice affreux,
Qui puisse être pour moi plus triste et plus honteux.
(17)

Puisque les bravades et les imprécations contribuent à rendre le personnage encore plus odieux, il en résulte une plus grande terreur. Le désespoir de Catilina se mêle en outre aux épanchements pathétiques de Tullie qui tente de détourner le coup que le traître veut se donner. Une fois qu’il s’est percé le sein, Catilina la conjure de ne pas pleurer sa mort :

Séchez vos pleurs, Tullie, et que prétendez-vous
D’un cœur dont la mort seule éteindra le courroux ?
Étouffez des regrets que ma fierté dédaigne,
C’est de mourir vaincu qu’il faut que l’on me plaigne.
(18)

Crébillon parvient ainsi à ménager la distribution des deux émotions tragiques (terreur et pitié), donnant à ses pièces un dénouement particulièrement bouleversant. C’est également le cas de sa dernière tragédie Le Triumvirat, au dénouement de laquelle se succèdent deux scènes terribles : le récit de la mort de Cicéron et le suicide de Tullie qui se tue en découvrant la tête tranchée de son père :

Mécène… la tribune… elle est toute sanglante !
Ce voile encore fumant cache quelque forfait.
N’importe, je veux voir : dieux ! quel affreux objet !

(Elle monte à la tribune et lève le voile.)
La tête de mon père… Ah ! monstre impitoyable,
À quels yeux offres-tu ce spectacle effroyable ?
(19)

Le suicide de Tullie relève ici d’une réaction violente face à une situation d’horreur insupportable, ce que laissent prévoir les propos tenus par le personnage confronté à la décision de quitter Rome sans Cicéron. La mort de ce dernier et le suicide de Tullie servent donc à produire un effet de terreur.

Comme dans ses tragédies à sujet mythologique, Voltaire semble rechercher dans ses tragédies romaines un plus grand effet pathétique d’autant que celles-ci mettent en scène les héros dignes de servir de modèles, du moins selon la réputation qui leur est couramment attribuée. Cette recherche peut expliquer l’absence de meurtre ou de suicide dans Le Triumvirat laquelle est valorisante pour le futur empereur : sa clémence est une source d’admiration et d’émotion face à l’attente de la mort de Sextus Pompée. Dans Rome sauvée, la construction du personnage de Cicéron relève du même travail de valorisation que dans le cas d’Auguste, si bien que ce n’est pas vraiment la disqualification de Catilina et encore moins le suicide d’Aurélie qui font l’objet du dénouement. Ce suicide ne manque toutefois pas de produire de l’effet sur le spectateur ému à la vue du violent désespoir d’Aurélie et impatient de savoir la réaction de Catilina ébranlé par un tel spectacle. Aurélie, venant supplier Cicéron de venger son père l’épée sanglante à la main, apprend sur scène qu’il est mort de la main de son amant et réclame la punition de Catilina :

Mes pleurs mouillent vos pieds arrosés de sang.
Secourez-moi, vengez ce sang qui fume encore,
Sur l’infâme assassin que ma douleur ignore.
(20)

S’ensuivent la révélation de l’assassin et une scène particulièrement pathétique ponctuée par un effet de terreur mis en œuvre par le suicide d’Aurélie et les imprécations de Catilina contre Cicéron.

Quoique horrible en soi parce qu’entraînant la mort, le suicide peut donc être exploité en vue de la production de la terreur en raison d’un violent désespoir et en raison de la surprise ou du passage prémédité à l’acte. Il est d’autant plus une source d’émotion qu’il se substitue pour une fois à la parole qui représente la plupart du temps la seule action scénique. Mais il permet également d’atténuer une action trop horrible dans le cas des affrontements entre les proches qui conduisent aux plus graves crimes contre l’humanité, et d’assurer la mort du personnage qui doit disparaître au profit de l’instauration du nouvel ordre. Son absence dans les tragédies de Voltaire met en évidence la recherche d’une autre dramaturgie, fondée sur le pathétique, en contraste avec la dramaturgie de la terreur mise en place par Crébillon. De tels choix supposent toutefois des valeurs incarnées par les personnages, sinon la démonstration d’une certaine vision du monde.


Le suicide tragique : quelles significations

La mise en œuvre d’une tragédie tient aux intentions du dramaturge malgré les contraintes liées au sujet que celui-ci peut invoquer dans la préface afin de justifier ses choix. Aucun mot, aucun geste n’est tout à fait imposé par les sources d’inspiration. Nombreux sont les cas qui montrent que le dramaturge les manipule selon ses besoins, qu’il s’agisse du dénouement frappant de l’Iphigénie de Racine ou des traitements différents d’un même sujet où le même personnage adopte des attitudes opposées. Ainsi, choisir ou non de recourir au suicide engage la signification de toute l’action tragique d’autant plus qu’il intervient au dénouement et qu’il a une portée idéologique en fonction du contexte historico-religieux dans lequel il s’inscrit. Les tragédies à sujet mythologique en sont parfaitement révélatrices même dans le cas de Crébillon qui ne semble pas vouloir influençant la pensée de ses spectateurs.

Ne pouvant pas du tout mettre en scène les affrontements physiques entre les personnages qui susciteraient la terreur, le dramaturge peut y suppléer par la violence verbale, poussée par Crébillon à l’excès. Pour augmenter l’effet d’une telle violence dirigée contre ceux que Sémiramis ne peut pas attaquer autrement, la mère incestueuse va jusqu’à s’en prendre aux dieux et les accuser de l’avoir rendue criminelle. Elle lance des récriminations de cet ordre à la fin du quatrième acte, à la suite de la révélation de l’identité de Ninias et par-là de la découverte de l’inceste, ce qui n’est pas sans incidence sur le sens de son suicide, qui pourrait se comprendre comme la volonté de prévenir la justice divine. La critique contemporaine ne laisse pas au reste de reprocher à Crébillon d’avoir rendu son héroïne impie(21). Le dénouement de la Sémiramis de Voltaire a en revanche une tout autre signification : le déroulement de l’action semble une démonstration spectaculaire de la Providence, montrant que même les plus puissants n’y échappent pas, ce que confirment les derniers vers énoncés par le grand prêtre :

Par ce terrible exemple apprenez tous du moins,
Que les crimes secrets ont les Dieux pour témoins ;
Plus le coupable est grand, plus grand est le supplice,
Rois tremblez sur le trône et craignez leur justice
. (22)

Paradoxalement, le matricide, au lieu de susciter la terreur, ne s’impose que comme un juste coup réclamé par l’ombre de Ninus, donnant l’impression que la main de Ninias est guidée par les dieux mêmes. Si l’Électre de Crébillon vise un effet esthétique sans prétention philosophique, celle de Voltaire s’inscrit dans la lignée tracée par Sémiramis. Que la mort de Clytemnestre soit recherchée qu’accidentelle, il reste qu’Oreste ne parvient pas à détourner le coup qui, réservé au seul Égisthe, atteint sa mère elle aussi coupable d’avoir attenté à la vie d’Agamemnon. En plus de la punition des deux criminels qui est une démonstration de la Providence par excellence, nombreuses sont en outre les sentences qui mettent en valeur une telle interprétation de l’action, traduisant l’espoir de voir déchus ceux qui ont injustement usurpé le pouvoir (23). Ce qui est original, c’est que Voltaire prolonge, dans Oreste comme dans Sémiramis, l’incompréhension et/ou la méprise de ses personnages sur les desseins de la Providence jusqu’à l’ultime moment de l’action dramatique qui les éclaire enfin. Or, si les coupables ont mérité d’être punis, l’incompréhension de celui qui semble exécuter la volonté divine bute aussi bien sur sa vertu que sur son libre arbitre : dans une tirade particulièrement polémique, Oreste accuse délibérément les dieux, « puissance impitoyable », de l’avoir fait coupable malgré lui. Son gouverneur et compagnon de voyage prêt à le suivre une fois Clytemnestre morte, Pilade, ponctue ces propos par un distique extrêmement provocateur, conforme à l’attitude d’Oreste connue dans les tragédies antiques :

Que l’amitié triomphe en ce jour odieux,
Des malheurs des mortels et du courroux des Dieux.
(24)

Les tragédies romaines sont tout aussi éclairantes sur les intentions philosophiques de Voltaire. Crébillon, qui cherche surtout à faire frémir ses spectateurs, n’est pas non plus en manque d’idées soutenant les attitudes de ses personnages. Celle de Catilina prêt à se suicider fournit un débat paradoxal sur la grandeur héroïque dans la mesure où ce personnage machiavélique ne compte pour rien les crimes qui auraient dû servir son ambition :

Cœur faible, qui rampant sous de lâches maximes,
Croyez l’ambition une source de crimes ;
Vaine erreur qu’un grand cœur sut toujours dédaigner ;
Apprenez que le mien était fait pour régner
. (25)

Catilina fait l’éloge du crime, justifiant sa conduite, comme d’autres personnages criminels mis en scène par Crébillon tels Atrée (Atrée et Thyeste) ou Artaban (Xerxès) en particulier. C’est son amante Tullie qui lui oppose, vainement, une opinion contraire à la grandeur qu’il entend gagner en se tuant :

Mais se donner la mort pour de honteux complots ?
Est-ce donc là mourir de la mort des héros !
Je devrais vous haïr, mais votre mort prochaine
Éteint tout sentiment de vengeance et de haine
. (26)

Aux yeux de Tullie, la mort que se ménage Catilina serait absolument inutile parce que le séditieux mourrait sans avoir remédié au mal qu’il a causé. Insensible à ces propos, Catilina se tue afin de braver une fois de plus son ennemi juré Cicéron, considérant devant Tullie que la mort « n’est qu’un instant/ que le grand cœur défie et que le lâche attend » (27). Dans Le Triumvirat, telle est aussi l’attitude de Cicéron confronté à la mort, selon le récit qu’on en fait à Octave. Le suicide de Tullie n’a toutefois d’autre signification que celle de braver le « tyran » qui se décharge de sa part de culpabilité sur Fulvie :

(Ta main) a-t-elle moins fait de barbarie ?
Ne lui conteste point un coup digne de toi.
Ô Sextus ! tout est mort et pour vous et pour moi.
Traître, pour assouvir la fureur qui t’anime,

(Elle se tue.)
Tourne tes yeux : voilà ta dernière victime. (28)

Le suicide d’Aurélia dans la Rome sauvée ou Catilina de Voltaire ne semble pas avoir non plus de signification particulière, en plus de ses enjeux dramatique et esthétique. Aurélie défie Catilina de l’imiter, c’est-à-dire de se donner la mort, les intérêts machiavéliques de celui-ci ne vont pas a priori dans ce sens-là tant qu’il a l’espoir d’évincer Cicéron. Cela ne veut pourtant pas dire que l’absence de la mort ou du suicide au dénouement, comme c’est également le cas dans Octave et le Jeune Pompée, ou le Triumvirat, ne serait pas porteuse d’une signification face aux tragédies de Crébillon. C’est que Voltaire, comme il s’en explique dans les préfaces, cherche à faire connaître les personnages historiques dignes d’être imités dans certains de leurs actes quitte à les retoucher pour les besoins du théâtre et de la leçon que la représentation doit délivrer. L’évitement du suicide dans le dénouement oriente donc la signification de la tragédie par la négative dans la mesure où la mort qu’aurait pu se donner le jeune Pompée avant de recevoir la grâce eût compromis la clémence d’Auguste. L’inaction de ce dernier dans la tragédie de Crébillon en est une preuve : quoique non coupable de la mort de Cicéron, il en devient responsable par l’absence d’intervention.

Placé au dénouement, le suicide est porteur de la signification polémique de l’action tragique étant donné qu’il traduit une certaine conception de l’univers dramatique. Aucun geste ne peut être gratuit car il engage les personnages éprouvés par le destin à prendre position. Même les personnages de Crébillon n’échappent pas à l’interprétation de leurs gestes notamment lorsqu’ils accusent les dieux et qu’ils se suicident de désespoir de se voir abandonnés ou forcés au crime. Ce qui eût pu être une simple recherche de l’effet devient ainsi particulièrement signifiant à l’époque des Lumières. Le suicide est en effet d’autant plus signifiant que dans la tradition judéo-chrétienne il est violemment réprouvé parce qu’offense à Dieu : puisque l’univers antique dans lequel se situent la plupart des sujets traités fait référence à l’actualité contemporaine, il peut participer au questionnement sur les valeurs véhiculées par l’Église catholique.


La rivalité imposée par Voltaire à son adversaire ne repose donc pas sur une simple volonté de l’évincer de la scène tragique. Cette rivalité située aux niveaux dramaturgique et esthétique confronte deux univers différents qui ne ressemblent que par la réutilisation des mêmes personnages et des faits tirés de la mythologie et l’histoire antiques. Ils s’opposent par les valeurs qu’ils véhiculent : alors que certains personnages de Crébillon sont irrémédiablement enclins au mal et sèment le désordre au sein de l’État qu’ils gouvernent, ceux de Voltaire sont davantage conscients de leurs défauts qui affectent leur rapport au monde. Crébillon tire profit du fonds du mal afin de susciter les deux émotions tragiques avec une prédilection pour la terreur. Paradoxalement, malgré tout le mal qu’il fait, Catilina parvient à se mettre en valeur précisément grâce à sa fermeté quasi « héroïque » vis-à-vis de ses ennemis. Crébillon mise ainsi sur la grandeur dans le mal comme le faisait autrefois Corneille avec Cléopâtre dans Rodogune qui se suicide également. Les personnages de Voltaire, excepté ceux qui, plutôt secondaires dans l’économie de l’action dramatique (Égisthe, Assur, Catilina), servent de repoussoir à ceux du premier plan, sont pourvus d’un fonds d’humanité grâce auquel ils s’attirent plus facilement la sympathie des spectateurs. Ils suscitent ainsi de la compassion, quelle que soit la résolution du conflit tragique.

Dans ces univers tragiques schématisés, la mort ne se conçoit donc pas de la même manière. L’exploitation du suicide par Crébillon et son rejet élimination par Voltaire prennent sens, creusant davantage les divergences entre les deux auteurs et mettant mieux en évidence deux conceptions différentes de la tragédie du XVIIIe siècle, celles de l’effet et de la mise à l’épreuve des idées. Si le suicide chez Crébillon est un moyen esthétique de rendre l’action plus spectaculaire et de produire un plus grand effet, il ne s’accorde pas avec l’humanité mise en valeur par Voltaire, que ce soit sur le plan religieux ou politique. Ce d’autant plus que, comme le dit l’article « Suicide » de l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, du point de vue de la morale, le suicide est « absolument contre la loi de la nature »(29). Voltaire contestait par ailleurs le recours au suicide déjà bien avant l’Encyclopédie, dans l’article Du suicide ou l’homicide de soi-même (1739), en l’attribuant plutôt aux coutumes d’un pays. Si bien que dans sa dramaturgie, le suicide n’est pas « gratuit », c’est-à-dire introduit pour le seul enjeu esthétique. Il peut n’avoir qu’un rôle dramaturgique dans Rome sauvée ; mais il est dans d’autres tragédies essentiellement « philosophique », selon la définition de Starobinski : « Le suicide philosophique, chef-d’œuvre de l’autonomie volontaire, […], s’expose à tous les regards ; la raison qui le gouverne requiert l’approbation universelle ; nous y trouvons l’image active et mâle du fer retourné contre soi, preuve d’une liberté toujours au terme de la bataille perdue » (30). C’est le cas de la Jocaste dans l’Œdipe de Voltaire qui se donne la mort au milieu du peuple thébain, incarné scéniquement par le chœur, et aux yeux mêmes du grand-prêtre qui représente le pouvoir divin explicitement bravé par l’épouse incestueuse : Jocaste accomplit ici ce que semblait faire la Sémiramis de Crébillon simplement pour raffermir l’éthos du désespoir mis en scène par la violence verbale. Cette première tragédie de Voltaire engage ainsi toute sa dramaturgie à venir et jette sur le suicide introduit dans l’action de ses pièces un regard suspicieux qui tend vers une signification plus profonde.


Marek OCENAS
Docteur en Lettres et Arts
Membre associé de l’UMR LIRE – équipe Lyon 18e

Notes et bibliographie

(1) Voir à ce propos le chapitre VII de la première partie de La Pratique du théâtre de l’abbé d’Aubignac « Du mélange de la représentation avec la vérité de l’action théâtrale ».
(2) Morvan de Bellegarde, Lettres curieuses de littérature et de morale, Amsterdam, H. Schelte, 1707, p. 200.
(3) lien
(4) Jean Starobinski, « L’épée d’Ajax », dans Trois fureurs, Paris, Gallimard, 1974, p. 11.
(5) Fontenelle, Réflexions sur la Poétique, art.LIII, p. 180, dans Œuvres de Monsieur de Fontenelle, Paris, Bernard Brunet, 1742, t. III.
(6) Ibid., p. 181.
(7) L’abbé Desfontaines, Observations sur les écrits modernes, Paris, Chaubert, 1743, t. 34, p. 259.
(8) Ibid., p. 260.
(9) C’est ce qu’Aristote explique dans le chapitre IX de la Poétique : « De ce qui a été dit résulte clairement que le rôle du poète est de dire non pas ce qui a réellement eu lieu mais ce à quoi on peut s’attendre, ce qui peut se produire conformément à la vraisemblance ou à la nécessité. » (éd. Michel Magnien, Paris, Le Livre de Poche, 1990, p. 98)
(10) Ces données varient en fonction de l’historien consulté : selon Diodore de Sicile, Sémiramis ne tue pas Ninus et la fin de son règne advient lorsque son fils conspire contre elle ; c’est alors que transformée en colombe elle disparaît. Diodore de Sicile concède néanmoins, en référence à un autre historien, que Sémiramis ait pu accéder au trône en faisant tuer Ninus. (Bibliothèque historique, liv. II, chap. XX). Selon Justin, Sémiramis se fait passer pour son fils, à la suite de la mort de Ninus, afin de ne pas perdre le trône, et ne se déclare femme qu’après quelques succès militaires. Ninias la fait finalement périr, excédé de l’amour incestueux dans lequel la reine s’égarait (Histoire universelle, liv. I, chap. I et 2).
(11) Les trois auteurs tragiques grecs séparent les meurtres d’Égisthe et de Clytemnestre, et disposent l’action de telle sorte qu’Oreste tue sa mère à l’assistance d’Électre en parfaite connaissance de cause, malgré les protestations de sa victime. Eschyle va jusqu’à imaginer une scène au cours de laquelle Oreste justifie devant Clytemnestre la raison pour laquelle elle doit mourir de sa main.
(12) Voltaire, Oreste, Paris, P.G. Le Mercier, 1750, V, 8, p. 67.
(13) Crébillon, Électre, V, 7, p. 341, dans Théâtre complet, éd. Magali Soulatges, Paris, Classiques Garnier, 2012, t. I.
(14) Crébillon, Catilina, V, 5, dans Théâtre complet, éd. citée, t. II à paraître.
(15) Voltaire, Préface de Rome sauvée ou Catilina, Dresde, 1753, p. III.
(16) Voltaire, Oreste, éd. citée, p. 68.
(17) Crébillon, Catilina, éd. citée, V, 6.
(18) Ibid.
(19) Crébillon, Le Triumvirat ou La Mort de Cicéron, V, 3, dans Théâtre complet, éd. citée, t. II.
(20) Voltaire, Rome sauvée ou Catilina, éd. citée, IV, 5, p. 75.
(21) Sémiramis déclare en effet : « Dieux, qui m’abandonnez à ces honteux transports,/ N’en attendez, cruels, ni douleur ni remords ;/ Je ne tiens mon amour que de votre colère,/ Mais pour vous en punir mon cœur veut s’y complaire ;/ Je veux du moins aimer comme ces mêmes Dieux/ Chez qui seuls je trouve l’exemple de mes feux. » (Crébillon, Sémiramis, V, 1, dans Théâtre complet, éd. citée, t. II). Et le rédacteur du Nouveau Mercure galant de dénoncer ces propos : « Sémiramis ouvre le cinquième acte par un monologue, où elle se retrace toutes les horreurs de sa passion. […] Ensuite, elle essaie de rejeter son crime sur les dieux mêmes, dogme un peu scandaleux ! » (« Article des spectacles, ou réflexions sur Sémiramis », p. 179-180, dans Le Nouveau Mercure galant, Paris, P. Ribou, juillet 1717).
(22) Voltaire, Sémiramis, Paris, P.G. Le Mercier, 1749, V, 8, p. 106.
(23) C’est notamment Pammène, « sage et prudent vieillard », qui invoque la providence : « La parole des Dieux n’est point vaine et trompeuse ;/ Leurs desseins sont couverts d’une nuit ténébreuse ;/ La peine suit le crime, elle arrive à pas lents » (Voltaire, Oreste, éd. citée, I, 2, p. 18). Mais c’est aussi Électre malgré ses doutes ultérieurs, soigneusement préparés par le dramaturge ; Électre déclare en effet : « Qui pourrait de ces Dieux encenser les autels,/ S’ils voyaient sans pitié les malheurs des mortels ?/ Si le crime insolent dans son heureuse ivresse/ Écraserait à loisir l’innocente faiblesse ? » (ibid., p. 19).
(24) Voltaire, Oreste, éd. citée, V, 9, p. 68.
(25) Crébillon, Catilina, éd. citée, V, 6.
(26) Ibid.
(27) Ibid.
(28) Crébillon, Le Triumvirat ou la Mort de Cicéron, éd. citée, V, 3.
(29) Lien
(30) Jean Starobinski, « L’épée d’Ajax », art. cit., p. 11-12.


Bibliographie

« Article des spectacles, ou réflexions sur i[Sémiramis] », Le Nouveau Mercure galant, Paris, P. Ribou, Juillet 1717.
« Suicide », Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers, <http://portail.atilf.fr/encyclopedie/>
ARISTOTE, Poétique, éd. critique par Michel Magnien, Paris, Le Livre de Poche, 1990.
BELLEGARDE, Morvan de, Lettres curieuses de littérature et de morale, Amsterdam, H. Schelte, 1707.
CREBILLON, Prosper-Jolyot de, Théâtre complet, éd. critique par Magali Soulatges, Paris, Classiques Garnier, t. 1, 2012.
CREBILLON, Prosper Jolyot de, Théâtre complet, éd. critique par Magali Soulatges, Paris, Classiques Garnier, t. 2, à paraître.
DESFONTAINES, Pierre-François Guyot, Observations sur les écrits modernes, Paris, Chaubert, 1743, t. 34.
FONTENELLE, Bernard de, Réflexions sur la Poétique, dans Œuvres de Monsieur de Fontenelle, Paris, Bernard Brunet, 1742, t. III.
STAROBINSKI, Jean, « L’épée d’Ajax », dans Trois fureurs, Paris, Gallimard, 1974.
VOLTAIRE, Oreste, Paris, P.G. Le Mercier, 1750.
VOLTAIRE, Rome sauvée ou Catilina, Dresde, 1753.
VOLTAIRE, Sémiramis, Paris, P. G. Le Mercier, 1749.


Profile

Marek OCENAS, né en 1984 à Banska Bystrica (Slovaquie), est membre associé de l’UMR LIRE – équipe Lyon 18e et docteur en Lettres et Arts (Université Lumière Lyon 2) et en Littérature romanes (Université Charles de Prague). Il a soutenu sa thèse, préparée en cotutelle internationale sous la direction conjointe des Professeurs Olivier Ferret et Ales Pohorsky, sur La Recherche de l'effet tragique à l'époque de la Régence : naissance de la tragédie philosophique le 11 septembre 2014. Il est titulaire d'un double master : l'un obtenu en 2010 à l'Université Lumière Lyon 2 pour son travail sur les Enjeux littéraires de la cruauté féminine. Le plaisir d’esprit pris au spectacle des vengeances de Mme de La Pommeraye et de la marquise de Merteuil, et l'autre obtenu en 2010 à l'Université Charles de Prague pour son travail sur L’Esthétique rococo dans le théâtre de Marivaux. Ses travaux portent ainsi sur la littérature et l’esthétique françaises du XVIIIe siècle, le théâtre étant son domaine de recherche privilégié. Il travaille actuellement sur l'édition critique des Macchabées et d'Inès de Castro d’Antoine Houdar de La Motte pour la collection Phoenix (éditions MHRA), codirigée par Pierre Frantz et Thomas Wynn. Dans le cadre d’un projet d’édition du CELLF 19e, il collabore aux annotations des Causeries du lundi de Sainte-Beuve, en particulier des articles portant sur les auteurs du XVIIIe siècle.

Thèse

Recherche de l’effet tragique à l’époque de la Régence : naissance de la tragédie philosophique

Dans le cadre général d’une interrogation sur le renouvellement de la tragédie classique française à l’époque de la Régence (1715-1723), le travail étudie plus spécifiquement
la manière dont la recherche de l’effet tragique conduit à la naissance de la tragédie philosophique. Ce travail prend appui sur l’analyse des pièces représentées à la Comédie-Française au cours de cette période et accorde une attention particulière à leur réception contemporaine dans la presse périodique et dans les brochures.

Il envisage d’abord les recherches de renouvellement de la tragédie à partir de deux polémiques, la Querelle des Anciens et des Modernes et la querelle sur la moralité du théâtre, en montrant comment la réflexion sur le théâtre conduit les auteurs à chercher des effets dramatiques mieux adaptés aux attentes d’un public dont la sensibilité évolue au début du XVIIIe siècle. Il établit ensuite que la production d’un plus grand effet est liée, d’une part, à l’intensification de l’effet de terreur à travers la mise en scène du personnage odieux et, d’autre part, à la recherche d’une plus grande action grâce à l’exploitation des éléments du sacré (oracles, prêtres et choeur). Il démontre enfin que, si les impiétés relevées dans un certain nombre de tragédies ne visent qu’à la production d’un plus grand effet, l’OEdipe de Voltaire peut être considéré comme la première tragédie philosophique dans la mesure où le dramaturge met en oeuvre une véritable stratégie critique et où les attaques contre la religion sont clairement perçues par le public contemporain. Le travail analyse ainsi de quelle manière les mutations qui affectent le dispositif dramaturgique dans cette quête de l’effet peuvent faire de la tragédie le lieu de la diffusion des idées qui participent de l’émergence des Lumières.

Le phénomène est déterminant pour les combats philosophiques à venir ainsi que pour la transformation de la société que les philosophes vont chercher à faire advenir grâce à un support accessible à un large public.

Sabine Chaouche



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